L’Organisation des États turciques, fondée en 2009 à Nakhitchevan, est une organisation intergouvernementale visant à promouvoir la coopération entre les pays turcophones dans plus de 20 domaines, notamment l’économie, la sécurité, l’éducation, l’histoire mutuelle et la culture. Cette union représente environ 300 millions de personnes sur une superficie de 4,5 millions de kilomètres carrés, émergeant donc en tant qu’acteur régional et mondial doté d’un potentiel économique estimé à 2000 milliards de dollars.
Les États membres fondateurs, comprenant l’Azerbaïdjan, le Kazakhstan, le Kirghizistan et la Turquie, ont été rejoints par l’Ouzbékistan en 2019. La Hongrie, le Turkménistan et la République turc de Chypre du Nord ont également obtenu le statut d’observateur. Depuis 2011, les dirigeants des pays membres se réunissent annuellement pour évaluer les périodes passées et définir des objectifs pour l’année suivante.
Au-delà de son rôle en matière de coopération politique, économique et sécuritaire, l’Organisation des États turciques sert de structure faîtière pour diverses entités culturelles. Ces dernières comprennent l’Assemblée parlementaire des pays turcophones (TURKPA) à Bakou, l’Organisation internationale de la culture turque (TURKSOY) à Ankara, l’Académie turque internationale à Nur-Sultan, la Fondation de la culture et du patrimoine turcs à Bakou, le Centre des civilisations nomades à Bichkek et le Conseil des affaires turciques à Istanbul.
Historique de l’Organisation des États turciques.
Fondation de l’Organisation des États turciques
La création de l’Organisation des États turciques (OET) découle de circonstances historiques et de facteurs déterminants qui ont convergé pour forger une alliance régionale unique. Parmi ces éléments clés, on remarque :
- La dissolution de l’Union soviétique, qui a ouvert la voie à l’indépendance de plusieurs pays turcophones d’Asie centrale, a créé un contexte favorable à une coopération renforcée entre ces États nouvellement indépendants ;
- Les membres fondateurs partagent des liens culturels, linguistiques et historiques étroits, créant une base solide pour une collaboration plus étroite dans des domaines comme la langue, la littérature, et les traditions ;
- La volonté partagée de relever les défis communs, de stimuler le développement économique et d’accroître l’influence régionale ;
- La stabilité politique croissante dans la région a créé un environnement propice à la coopération multilatérale.
Les premières discussions entre les membres fondateurs (l’Azerbaïdjan, le Kazakhstan, le Kirghizistan et la Turquie) ont émergé dans le sillage de ces événements. Les dialogues initiaux ont été marqués par une reconnaissance mutuelle des avantages potentiels d’une coopération. Les déclarations conjointes et les premiers accords ont jeté les bases d’une collaboration institutionnalisée, inaugurant la genèse de l’Organisation des États turciques.
Évolution au fil du temps
L’OET a traversé plusieurs étapes marquantes depuis sa création en 2009. La réunion inaugurale à Nakhitchevan a jeté les bases institutionnelles, suivie d’une phase de consolidation avec le renforcement des organes décisionnels et l’élaboration de projets communs (ex : Mise en place d’une zone de libre-échange entre les membres de l’OET pour stimuler le commerce intra-organisationnel). Cette évolution rassemble les membres autour d’une volonté commune de transformer l’OET en un acteur régional de premier plan.
L’adaptabilité de l’organisation face aux défis changeants a été évidente à travers des changements structurels et institutionnels. Des révisions statutaires, des élargissements de compétences (par exemple, l’ajout de domaines de coopération tels que la cybersécurité, la gestion des ressources naturelles et la lutte contre le terrorisme) ainsi que la création de nouveaux organes, comme un comité d’urgence, ont renforcé la capacité de l’organisation à répondre aux besoins de ses membres.
Élargissement et adhésions
L’intégration à l’Organisation des États turciques se déroule selon des critères définis par les membres fondateurs. Ces critères mettent en avant l’importance de l’engagement envers la coopération mutuelle, le respect des valeurs partagées (Par exemple, la promotion de la diversité culturelle et l’engagement en faveur de la paix), et la capacité à contribuer de manière significative à la mission commune de l’organisation.
L’adhésion de l’Ouzbékistan en 2019 représente une étape importante dans l’évolution de l’OET. Cette décision stratégique de rejoindre l’organisation s’explique par l’évolution politique et économique de l’Ouzbékistan depuis son indépendance en 1991.
Outre les membres à part entière, la Hongrie, le Turkménistan, et la République turque de Chypre du Nord ont obtenu le statut d’observateur. Ces observateurs manifestent un intérêt particulier pour la coopération sans adhérer pleinement. La Hongrie, en particulier, a renforcé ses liens avec la Turquie au cours de la dernière décennie, s’inscrivant dans une politique d’ouverture vers l’est. Ces membres observateurs cherchent à intensifier leurs relations bilatérales, participer à des projets spécifiques et évaluer l’impact de l’organisation sur la région.
Projets et missions de l’Organisation des États turciques.
Au sein de l’Organisation des États turciques, plusieurs projets de coopération ont été initiés pour renforcer les liens entre ses membres et promouvoir le développement régional. Sur le plan économique, en plus de la création d’une zone de libre-échange entre les États membres, l’OET se consacre au développement d’infrastructures régionales, tels que des corridors de transport, afin de faciliter la circulation efficace des biens et des personnes au sein de l’organisation.
Dans le domaine éducatif et culturel, l’organisation s’est distinguée par l’établissement d’un programme d’échanges d’étudiants, favorisant la compréhension interculturelle. En vue de préserver le riche patrimoine culturel commun, des initiatives conjointes, incluant des projets de restauration et de promotion touristique ont été lancé.
La sécurité régionale demeure une préoccupation centrale, avec une coordination des efforts dans la lutte contre le terrorisme et le crime organisé. Des exercices conjoints et des programmes de formation ont été déployés pour renforcer les capacités de sécurité des membres et assurer une réponse collective. Dans le domaine de la recherche et du développement, l’OET promeut l’innovation à travers la création d’un fonds commun finançant des projets de recherche scientifique et technologique.
Enfin, l’engagement environnemental se manifeste à travers des initiatives de préservation, comme la gestion durable des ressources naturelles partagées. La coopération s’étend également à la lutte contre les effets du changement climatique, avec des projets d’adaptation et d’atténuation (reforestation et construction de parcs éoliens).
Conclusion
Par conséquent, l’Organisation des États turciques se positionne comme un moteur de coopération régionale dynamique depuis 2009. Les perspectives sont prometteuses, avec un accent sur la croissance économique, l’intégration régionale, et la préservation des liens éducatifs et culturels. L’OET demeure un acteur clé pour la stabilité et la prospérité du monde turcophone, consolidant son rôle dans la promotion d’une coopération mutuelle fructueuse entre ses membres.
Matthieu Hébrard, chargé de veille stratégique sur la région du Caucase