Au centre d’un glissement géopolitique en Afrique de l’Ouest depuis 2023, le Niger est un État clé dans le développement du continent. Situé dans la région du Sahel, le territoire est bordé par la Libye au nord-est, le Tchad à l’est, le Nigeria au sud, le Bénin et le Burkina Faso au sud-ouest, le Mali à l’ouest et l’Algérie au nord-ouest.
Démographie
D’après le World Population Prospects, la population du Niger est estimée à 26,2 millions d’habitants. Parmi eux, 12,8 millions, soit près de 49 % de la population, ont moins de 14 ans. La même proportion a entre 15 et 64 ans. Cela est dû à un taux de naissance élevé de 4.5 %. En comparaison, en France, il est de 1.04 %. Le territoire est principalement désertique au Nord. Par conséquent, la population est concentrée au Sud dans la région du Zinder, Tahoua et à l’Ouest près de la capitale Niamey. On distingue plusieurs ethnies sur le territoire : les Haoussa (47,2 %); les Zarma (18,2 %) et les Peuls (8,3 %). À ceux-ci, s’ajoutent les Songaï, les Touaregs, les Kanouri et les Maures. La quasi-totalité de la population est musulmane. Peu de données sont disponibles, mais le taux d’alphabétisation au Niger est parmi les plus bas au monde. De plus, le phénomène touche inégalement les deux sexes : d’après l’association Oxfam, 18 % des femmes savent lire et écrire contre 40 % des hommes. Le manque de scolarisation est l’une des raisons de la persistance des mariages forcés de mineures. Ainsi, « 28 % des femmes âgées de 20 à 24 ans ont été mariées ou ont vécu en union avant l’âge de 15 ans », selon la même source.
Contexte historique
Le peuplement du territoire nigérien remonte, au moins, à 5 000 avant notre ère. Le commerce transsaharien a fortement influencé l’actuel Niger, notamment par l’introduction de l’Islam. Grâce à ces échanges, des empires, tels que le Sultanat songhaï (1464 – 1591), prospèrent. Celui-ci, entre autres, émerge dans la vallée du fleuve Niger à la frontière entre le Mali et Niger aujourd’hui.
Le territoire est conquis par les Français qui atteignent le lac Tchad en 1890. Malgré les résistances Touareg dans l’Aïr, le Niger devient colonie française en 1922. Après son indépendance en 1960, Hamani Diori dirige le pays jusqu’en 1974. À cette date, son gouvernement est renversé par un putsch qui amène une junte militaire au pouvoir. Durant les décennies suivantes, le Niger connaît une forte instabilité politique avec une succession de coups d’État et une incapacité à mettre en place un gouvernement civile durable. Le dernier coup de force date de 2010 et a donné lieu à une transition au pouvoir civil. Ainsi, Mahamadou Issoufou est élu président en 2011. En février 2021, ne pouvant être reconduit au-delà de deux mandats, c’est son dauphin Mohamed Bazoum qui est élu président. Après un mois seulement, une nouvelle tentative de coup d’Etat est déjouée. Toutefois, deux ans plus tard, Abdourahamane Tchiani, commandant de la garde présidentielle, prend le pouvoir par la force et préside le « Conseil national pour la sauvegarde de la patrie » (CNSP).
Contexte géopolitique
Rapprochement de la Russie
Avant le coup d’État en 2023, le Niger disposait d’un régime démocratique semi-présidentiel. La constitution de la VIIème République a été adoptée en octobre 2010 durant la période de transition suivant le coup d’État de février de la même année. Les institutions sont suspendues suite au putsch du 26 juillet 2023. Ce dernier s’inscrit dans une série de coups similaires dans les États voisins depuis 2021 : au Mali, en Guinée et au Burkina Faso. Ces quatre régimes ont en commun la présence de la société militaire privée russe Africa Corps (ex-Wagner) sur leur territoire. En effet, le 10 avril dernier, les premiers militaires des Africa Corps sont arrivés au Niger. En outre, ils ont exprimé leur éloignement des puissances occidentales, France et États-Unis, au profit de la Russie. En témoigne la deuxième édition du sommet Russie-Afrique organisée en juillet 2023. Le Niger était absent à l’événement, mais les présidents par intérim du Burkina Faso, Assimi Goïta, et du Mali, Ibrahim Traoré, y étaient présents.
Intégration régionale
Le Niger, comme les autres régimes militaires, était membre de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). En réaction aux putschs, l’organisation a suspendu les quatre membres, auxquels elle a aussi appliqué des sanctions économiques. Elle a fermé les frontières terrestres et aériennes, suspend toutes les transactions commerciales et financières entre la Cédéao et le Niger, et gèle des avoirs de l’Etat nigérien auprès des banques commerciales et centrales. Par ailleurs, l’organisation a menacé d’intervenir militairement afin de rétablir le gouvernement civil de Mohamed Bazoum. Cependant, face à la réticence de l’Union Africaine et de la population des Etats membres, la Cédéao n’a pas mis en application ses menaces. Celles-ci ont tout de même rapproché les régimes militaires de la région qui ont formé l’Alliance des Etats du Sahel (AES). Composée du Mali, Burkina Faso et Niger, elle visait à « établir une architecture de défense collective et d’assistance mutuelle » afin de contrer une possible invasion militaire de leurs territoires. Les trois États ont élargi les perspectives de coopération à d’autres domaines, notamment commercial. À cet égard, le 28 janvier 2024, ils ont annoncé leur sortie de la Cédéao. Un mois plus tard, les sanctions à leur encontre sont levées après leur échec à impacter les dirigeants en place. En effet, les sanctions ont principalement affecté la population dont une part importante (40 %) vit sous le seuil de pauvreté.
La menace terroriste
Le terrorisme est un élément indispensable pour analyser le Niger. Le pays sahélien y fait face durant les années 2010 alors qu’il se remet à peine d’une rébellion de la population Touareg. Pour ce faire, en 2014, il s’allie à la Mauritanie, au Mali, Burkina Faso et Tchad pour créer le G5 Sahel. Cette alliance est d’abord militaire et repose sur un partenariat avec la France qui mène depuis 2013 l’opération Barkhane. Les forces armées du G5 Sahel ne bénéficient pas d’un mandat des Nations Unies ce qui a fortement limiter son financement. En face, on trouve des groupes terroristes tels que l’Etat Islamique dans le Grand Sahara, le Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans ou encore Jama’at Nusrat al Islam wal Muslimeen, une alliance de groupes affiliés à Al-Qaida au Maghreb Islamique. Ces derniers agissent principalement au Sud-Ouest du Niger en profitant des frontières poreuses avec le Mali et le Burkina Faso. Le G5 Sahel échoue à accomplir ses objectifs en raison du manque de matériel, de formation et de moyens financiers. Le Niger finit par quitter l’organisation au même moment que le Burkina Faso en décembre 2023, après le retrait du Mali un an auparavant.
L’ancien président Mohamed Bazoum avait réussi à sécuriser le pays des attentats terroristes. Toutefois, la junte militaire, craignant une possible intervention étrangère, a concentré ses troupes sur la capitale Niamey. Par conséquent, les attaques reprennent sur le reste du territoire. La dernière date du 22 mars 2024 et a coûté la vie à 23 militaires pris dans une embuscade au Sud-Ouest du pays.
Économie
Avec un produit intérieur brut (PIB) de 15,342 milliards en 2022, selon la Banque mondiale, l’économie nigérienne est peu diversifiée. En effet, l’agriculture (secteur primaire) contribue à 40 % du PIB. Toutefois, la sécheresse limite les rendements de ce secteur dont dépend 80 % de la population. Ce phénomène est d’autant plus accentué par le réchauffement climatique qui cause des inondations de plus en plus fréquentes. Des efforts sont accomplis afin d’y pallier : le barrage de Kandadji, en cours de construction sur le fleuve Niger, permettrait d’assurer l’irrigation des terres arables à l’Ouest du pays et l’alimentation en eau potable pour la région de Niamey.
L’industrie d’extraction est également un secteur important contribuant à hauteur de 20 % du PIB. L’uranium est la principale ressource extraite. En effet, le Niger en est le quatrième producteur mondial contrôlant près de 7 % des parts de marché. En outre, il détient la sixième plus grande réserve et fournissait en 2022 25,38 % de l’uranium importé en Union Européenne. Selon l’Agence européenne de l’énergie atomique Euratom, la France acheminait 19 % de ses importations depuis le Niger sur la période 2005-2020. L’entreprise française Orano se charge de l’extraction par le biais de sa filiale Somaïr.
Bien que les réserves pétrolières du Niger soient connues depuis 1975, il faut attendre 2011 pour les premières extractions dans le champ d’Agadem, au Sud-Est du pays. Celui-ci est exploité dans le cadre d’un partenariat entre l’Etat du Niger et la China National Petrolium Corporation (CNPC). Le pétrole extrait est ensuite acheminé à la raffinerie de Zinder qui produit 20 000 barils par jour. Cette production est destinée d’abord à la consommation interne avant d’exporter l’excédent aux pays voisins. En mars 2024, la CNPC annonce la mise en service d’un oléoduc reliant le Niger au Bénin qu’elle a financé avec un coût total estimé à 7 milliards de dollars. Ainsi, Niamey exportera 90 000 barils de pétrole brut par le port de Sèmè au Bénin.